couverture

© Futuropolis

L’album de Manuele Fior publié aux éditions Futuropolis s’ouvre sur un paysage urbain et des cimes d’arbres, la nuit. Les noirs profonds de l’encre et le fusain des planches imposent d’emblée une atmosphère à la fois familière et étrange.

Rainiero, un psychologue, rentre chez lui et écoute son collègue Valter qui lui conte par téléphone ses ennuis avec une stagiaire qu’il a séduite. Soudain, une forme apparaît dans le ciel, un triangle semblable aux formes géométriques des tableaux de Miró… La voiture quitte la route, l’accident initial va être le début d’une longue série de déplacements, de bouleversements.

accident

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Le récit, habilement construit, joue en effet sur les modifications d’un quotidien qui échappe au personnage. Qu’a-t-il réellement vu ? Tout comme lui, le lecteur, troublé, découvre que l’action se situe en 2017 et que Rainiero est bien un des dernier à utiliser sa vieille voiture-essence, symbole d’un monde ancien voué à disparaître.

 Dans cet univers en mutation, Manuele Fior met en scène la confrontation de deux générations qui s’observent, se méfient et ne se comprennent pas. Rainiero aura pour patiente Dora, jeune femme qui pense être en contact avec des civilisations extraterrestres dont elle voit les signaux.

dialogue

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Elle et ses amis incarnent cette jeunesse insolente qui souhaite multiplier les partenaires en se basant sur la nouvelle convention dont le principe est « la non-exclusivité émotive et sexuelle ».

 Dora, femme « lutine » donne son souffle au récit et retrouve Rainiero, un soir, alors qu’il est seul dans sa grande maison construite par son père architecte. Tous deux s’unissent et cette nuit, libératrice, perturbatrice, est au cœur de l’album marquée par des planches d’un noir opaque. Les visages, la lumière n’apparaissent qu’à la fin du récit, dans la dernière partie qui donne son titre à l’album : L’entrevue.

maison

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Primé à Angoulême en 2010 pour Cinq mille kilomètres par seconde, Manuele Fior signe un album élégant où les références artistiques sont nombreuses: le visage de Dora sortant de l’obscurité évoque Odilon Redon; la maison de Rainiero ou les intérieurs de bâtiment rappellent qu’il fit d’abord des études d’architecture et les ambiances, parfois cinématographiques, font penser à Antonioni. Mais au-delà de ces références, c’est bien l’histoire qui touche. Il réussit à lier l’élégance du dessin, le grain particulier de ses fusains à un récit d’anticipation original.

C’est un album à découvrir, à lire, à relire, à feuilleter… bref un indispensable dans la bibliothèque, un vrai coup de cœur !

regards

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Le travail de cet artiste italien vivant à Paris est à découvrir sur son blog: http://www.manuelefior.com/.

Véro.

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